ce que vos yeux vairons

Mois : octobre, 2022

Deux méandres

Dans la remise

La terrasse à grande eau
Le parquet de la salle de bal coud son point de Hongrie
Sur le pont d’un bateau
Le clapot de l’herbe sous le ponton
Ses reflets Veronese et les mousses glissantes
Sur les lames à l’ombre, oú valsent
Les danseurs, les mousses au pied peu sûr,
Les deux ronds de sorcière plus clairs,
Où les chats passent le plus clair du jour,
Les beaux jours,
On frotte
L’eau à haute pression cingle
Les nœuds en nuage du bois
Révélés,
La lumière en pinceau
Sur les cernes soyeux de son astrakhan,
Le bois mouillé est d’un ébène profond
Demain, le soleil, nous le savons,
Lui rendra son auburn châtaigne séchant
Puis l’éclaircie sur la chevelure,
Les planches de hêtre en bandeaux
Autour du visage,
Blé à l’ombre.
La terrasse,
Peignée,
L’hiver-bourrasque
Lui rendra
Sa figure de folle,
Feuilles mortes,
Coulures vertes,
De Hollandais Volant,
De ponton roulant
La rabane de son tréteau
Sur un étang
Sans fond

Lecture dans un coracle

On prend place dans l’habitacle rond.
Une carapace de tortue ingouvernable,
Alors on laisse le courant sous-jacent faire.
Un bout de ligne droite,
Un rocher affleurant,
Une pensée y croît,
Un coup contre le bord enherbé,
Qui lève le lièvre
D’un oiseau endormi,
On rebondit,
De poème,
En poésie,
On transforme
Les rames
En petit bois,
Y laisser nicher
Les cygnes aux abois,
Le soir venu,
Itinéraire changeant,
Un mot sur un poteau indicateur,
La Patagonie c’est par là qui tourne comme une girouette,
Qui va là ?
Tu tournes autour de la vasque de bois d’une roulette,
Dans quel petit compartiment vas-tu tomber,
Bille aimantée par le hasard,
Dans quel terrier,
Alice aux agrès choisit le trampoline
Lire est un…
Le croupier annonce la couleur

Boutique des musées

Mirage de la langue
Venise évanescente, Kitège en fata morgana lacustre, ondoie, blanche
Être du matin
Sous la coupe d’un soleil d’étain
Sans un bruit s’asseoir sur le rebord d’un cil recourbé
Mais, de l’attention,
Vertige,
È pericoloso sporgersi.
S’aligner,
Le devenir d’un tout petit point
De la mire
Sur l’espace fuligineux,
Turner peint.
Plonger le long
De son regard
Sous les apparences,
Palazzo en lévitation,
Le fond de la lagune.
Le soutènement,
Les pieux,
Les madriers noirs,
La forêt pétrifiée,
Le front de taille,
Les haveuses,
Les jambes qui battent l’eau
De la natation synchronisée,
Six nageuses dans l’ombre,
Pour le jaillissement
D’une sirène luisante
Dauphin qui retombe
Avec les applaudissements.
Les fondations rondes,
Jarrets de taureau,
Et cous d’Atlante
Le long desquels
Court un petite
Gazelle
À peine née,
Qui ira couronner
Le cimier
D’une tour
Catalane
D’une étoile de verre soufflée rouge,
J’ai raflé
Des mains de Jane Katherine Hepburn Hudson
Son gobelet
Ensuite.
Le plus délicat,
Faire tenir tout cela
Sur la pointe des pieds,
À côté
Du Sacré-Coeur,
De la Statue de la Liberté,
De la gondole,
Des chats qui ont
Un peu froid sur la piazzetta,
C’est toujours l’hiver
Dans ces boules de neige,
Dont la neige ne fond pas,
Mirage
Secouer doucement,
Éveil de Jeeves

Le jour, les jours, la nuit, un drap ajouré

Jusqu’à l’ossature,
Celle du vent
La feuille d’arbre émiettée,
Chapelure,
Et squelette
Jusqu’au sertissage,
Les plombs du vitrail
Où passe le soleil
Le verre est tombé,
Le filigrane
L’épair du papier si poncé,
L’épeire sans repère,
Labyrinthique,
Marche sur de la transparence
Réordonne les cernes
Plus sombres
De son filet,
Au matin,
Des cordées
De perles
De la rosée
Donnent corps
À la toile,
Poupée
De chiffon
Vide
Incarnée
Par l’étoupe,
Une joue de coton
Rosit

Le soir, fruit vert

Penser en nuage

Le petit, l’art domestique.
Nourrir le chat 1
Le chat 2
Le chat sans nom qui planque dans le jardin, il aimerait bien,
Ce que lui laissent 2, et 1.
Il est tigré timidement.
Les gestes automatiques,
Ne pas ramasser les feuilles d’or à terre, les vers s’y enfouissent, le bec d’un oiseau, l’hiver,
Retrouver la recette d’entre toutes celles qui ira bien quand Isabelle qui sabre les rubans remontera de son Midi, quelque chose à la cannelle, elle qui ne vit maintenant plus que d’anis,
Lisser l’arc des sourcils de Jeeves, d’un doigt humide,
Ne pas penser aux 19 degrés réglementaires
Octobre doré, je jouis de son safran coupable,
Le grand écart entre
Ce qui va mal
Et ce qui ne va pas trop mal,
L’adverbe pèse de tout son poids sur ta nuque,
Suffoque, la tête sous l’eau.
Et au-delà,
Plus haut,
L’air qui te manque
Sors les épaules
Est doux,
Laisse tout ruisseller
Le monde lourd à porter,
Mais ton monde petit,
Tu as un devoir envers lui.
Rends-le plus,
Mouvement de râteau sur le gravier ordonné,
Beau

Mais encore

Oiseau de feu
De conte de fées
Fend l’étoffe noire
De la nuit, là-bas, la guerre
Et ici-bas, plus de lumière.
On compte les grains de blé et les gouttes d’eau
Là-bas, la balle des grains de blé,
On arrache aux poules leurs dents,
Cabinet de curiosités de l’occident,
Tout se vend
Mais surtout pour qu’elles tiennent
Leur rang, le dernier des biffins,
Après les vieux,
Qui n’ont plus un liard rouge
Mais une bouche aux dents blanches lacunaires
Aux pions noirs alternés.
Je traverse la rue étoilée,
Cependant que les lampadaires retiennent
Leur haleine orangée, désormais
Je vais chercher le journal
Le porteur, je le devine à tâtons,
Monde froissé,
Obscur.
Poser un lumignon sur le rebord de la fenêtre, une corne de brume,
Bâillonner les sirènes funestes,
Ôter les pierres,
Aplanir le chemin,
Jusqu’à la boîte aux lettres

Jpeg

Canon X — la regina gioiosa

Vu et entendu chez Claudio Capriolo, la regina gioiosa, wordpress

Conlon Nancarrow (27 ottobre 1912 - 1997): Study for Player Piano No. 21 (Canon X; 1961). Pianoforte automatico Ampico Bösendorfer di Jürgen Hocker, dedicatario della composizione.

Canon X — la regina gioiosa

Le pot-aux-roses

Jpeg