L’âge de pierre
Le rocher, un mortier qu’a creusé une éternité d’eau de mer, et la dureté de diamant d’un galet rond qui sera sable, après avoir été gravier, quand le temps aura passé, et le rocher se détachera, calebasse polie.
Le rocher, un mortier qu’a creusé une éternité d’eau de mer, et la dureté de diamant d’un galet rond qui sera sable, après avoir été gravier, quand le temps aura passé, et le rocher se détachera, calebasse polie.
La lenteur, une fleur, et son corollaire, une échelle du temps qui ne mesure rien, pas encore, puisqu’il n’existe pas, le temps, une fleur d’avant la datation, rien n’est encore dit, ni écrit, l’homme est en bourgeon dans ce batracien, qui s’apprête à sortir de l’eau, soupe primordiale, et à haleter, pour la première fois.
Il y aura des aubes et des aubes, en myriades, mais rien ne compte, hormis cette respiration.
J’écris, j’ai oublié que mes poumons furent branchies.
Une aube lointaine, à peine rosée, forêt de Sumatra, haut dans le ciel, en contre-plongée, une accentuation, traînée de condensation d’un avion, tout en bas, un petit point, parmi la végétation, un arum titan déploie sa corolle, antédiluvien.
J’écris, et je bégaie, toujours la même chanson.
Rien ne change, tout se décline, je n’échappe pas à mon écriture, chemin de servitude.
L’écriture a son caractère, le mien est météorologique, la paresse de dire la laine, l’hiver, la facilité de la paillette, tout se dore, les peaux, les mots, les peaux des mots, saucisson, et vin rosé, carats de la pyrite, mon parasol, ailes de cigales, écrire à contre-saison, et se muer en Marthe, comme un outrage à la légèreté, voir les plaies des feuilles qui déjà se cornent.
Et soudain, ce qui d’ici, de la banquette de pierre, me semblait buisson de fleurs, se mit à bouillir, l’impression brouillée d’une image, dans une pièce d’eau, les boutons de fleurs, isocèles, un pli, une amorce d’origami, ouvrirent lentement leurs pétales, et se détachèrent, répondant à quelque mystérieux signal, défoliant le buisson, un nuage mouvant, couleurs sur le ciel d’un banc de papillons.
Märchen, à pas contés, mon premier tient en quatre lettres.
Si vous trouvez, roi serez, une couronne d’aube ceindrez.
Voyage au pays des bocaux, des mots longs comme des phylactères médiévaux, et mystérieux, Stachelbeeren, Johannisbeeren, une bouteille, ventrue, comme une cornue, un liquide jaune, une liqueur, je cherche l’athanor, je reconnais l’écriture de l’alchimiste, sur les petits pots de confiture, je referme l’armoire, ses deux vantaux, repliés comme des ailes, un retable.
Je suis ailleurs.
Tout me le dit.
Le Vopo, jambes en ciseaux.
Le cadre étroit de la photo, coureur de haies grises.
Un hallier pousse sous ses pieds, plus vite qu’un bosquet de bambous, des fleurs carrées, le vénéneux des agglos.
La transgression, à jamais suspendue.
Je secoue le cadre, comme une boule de neige remplie d’eau.
Le saut de l’ange, le Vopo déchire le papier, et passe de l’autre côté.
Le mur, un miroir, je secoue encore, son casque vert, tête la première, je fais un pas de côté.
Car il tombe.
« C’est le vent »
Son bélier, sur la porte, sous la jupe trop courte de la cloison, se presse une forêt de feuilles mortes, des odeurs de mousse, qui passent, un paillasson, le lit, peut-être d’une nixe, soulevée des eaux, le torrent, son enlèvement.
Je crois au ravissement, vienne un faune, Märchenland, so heißt du.